Humberstone est un lieu digne d’un décor de film post-apocalyptique. Ou est-ce d’un décor de Far-West ? Difficile de choisir…C’était la première fois que nous marchions à travers une ville fantôme. C’est toujours un sentiment très particulier de visiter des lieux anciennement débordant de vies, vidés de toutes vies. Nous avons été littéralement captivés par cet endroit ! C’est clairement une visite hors des sentiers battus à faire lors d’un voyage au Chili.
Une journée à Humberstone, la ville fantôme au nord du Chili
✴ Histoire d’Humberstone, d’une cité prospère à une ville fantôme
Avant de partir à la découverte du site, il est utile de comprendre l’histoire de ce patrimoine industriel. Santiago Humberstone, appelée autrefois La Palma, et Santa Laura sont deux anciennes cités minières construites en 1862 et 1872 pour exploiter le plus grand gisement de salpêtre au monde, plus connu sous le nom de nitrate de soude. Ces deux usines de salpêtre abandonnées sont alors un témoignage de l’ère industrielle du Chili. Le nitrate de soude était utilisé comme poudre noire pour les armes mais aussi comme engrais. C’est grâce à ses propriétés fertilisantes, qu’il fut utilisé à grande échelle dans l’agriculture de l’Amérique du Nord, du Sud ainsi qu’en Europe.
Au XIX ème siècle, cet « or blanc » a permis de classer le Chili, premier producteur mondial de nitrate de soude naturel. A son apogée en 1890, l’industrie du salpêtre représentait 50% du PIB Chilien ! A l’époque, l’exploitation minière a généré énormément de richesses pour le Chili. Et puis, la première guerre mondiale et la fabrication de nitrate de synthèse, entraineront le déclin de cette industrie et le démantèlement de ces installations. Seuls Humberstone et Santa Laura réussiront à survivre.
Classé au Patrimoine mondial de l’Unesco en 2005, ces deux sites sont complémentaires. Humberstone dévoilera principalement les vestiges d’une ville minière tandis que Santa Laura nous livrera les vestiges des installations de production du salpêtre.
Des milliers d’ouvriers venant du Chili, du Pérou et de Bolivie, vécurent et travaillèrent ici dans un environnement hostile. On surnommait d’ailleurs les habitants de la Pampa, les Pampinos, qui créèrent un mode de vie communautaire unique. Ils marqueront aussi l’histoire car ils sont considérés aujourd’hui comme des pionniers de la lutte sociale pour obtenir de meilleures conditions de travail.
Maintenant que vous connaissez un peu mieux l’histoire des lieux, laissez-nous vous emmener les découvrir…
✴ Visiter Humberstone au Chili en 1 journée
Nous ne pensions pas trouver de villes fantômes en lors de notre séjour en Amérique du Sud. C’est donc avec une certaine excitation que nous avons entamé la visite d’Humberstone. Armés d’un plan fourni à l’entrée du site, nous sommes partis seuls en exploration. Nous apprenons alors qu’Humberstone se divise en deux parties : le secteur urbain et le secteur industriel.
∼ Le secteur urbain
C’est sous un soleil de plomb et un ciel bleu azur que nous avons commencé notre visite. Le quartier résidentiel reflète la microsociété qu’abritait Humberstone. Les personnes les plus hauts placées disposaient de jolis mobiliers dans des maisons aisées avec une cour intérieure. Les ouvriers mariés avaient droit à certains privilèges que ceux, célibataires, ne possédaient pas comme une salle de bain privée et une maison plus grande. C’était très étrange de pénétrer dans ces habitations qui ont été le lieu de vie de nombreuses personnes dont seuls les objets poussiéreux et oxydés par le temps en sont les témoins.
Nous avons continué d’arpenter les rues en découvrant la piscine municipale, le terrain de jeux, le club…Ehh oui, c’est avec surprise que nous avons trouvé une salle de bal avec son bar sculpté dans du bois. Nous nous sommes même octroyés une danse sur l’estrade en chantonnant une chanson tout en imaginant les gens danser et rire aux éclats !
Puis, notre errance nous a mené à d’autres bâtiments communautaires tels que l’hôtel, l’église, le marché, le théâtre… Le tout s’articulant, autour d’une immense place où des pergolas et des bancs ont été construits pour offrir un peu d’ombre. Quelques arbres y ont même trouvé refuge. Cependant, un des bâtiments qui nous a vraiment marqués, fut le théâtre. Sa façade en bois, contraste avec l’intérieur Art Déco. Lorsque nous avons franchi le seuil, nous avons été ébahis ! D’immenses rideaux rouges, des murs bleus-verts et de magnifiques sièges en bois ! Une vraie beauté en plein milieu du désert.
L’école restera aussi gravée dans nos mémoires avec ses pupitres de bois. La cour n’accueille plus de cris d’enfants mais seulement le bruit métallique de la balançoire frappée par le vent. Nous n’avons donc pas hésité pour lui redonner vie le temps d’un instant.
∼ Le secteur industriel : l’ancienne usine de Salpêtre
Sans aucun doute, le secteur qui nous a le plus intrigués. Il est situé à l’écart du secteur urbain. La route en sable qui y mène est jonchée de part et d’autre d’outillages en tout genres. Arrivés sur place, nous avons découvert d’énormes bâtiments industriels dont la centrale électrique, les ateliers ferroviaires, la fonderie, et l’immense cheminée trônant au milieu du site. A chaque endroit où nous avons posé les yeux, nous avons remarqué que le temps avait fait son oeuvre. Les tôles sont oxydées, percées laissant ainsi transpercer les rayons du soleil sur ces lieux désertés.
A Humberstone, il est possible d’entrer quasiment partout. D’un hangar à un autre, le temps s’est véritablement figé. Les outils recouverts d’une épaisse couche de poussière, n’ont pas bougé depuis des dizaines d’années. Nous avons eu la sensation que les lieux ont été quittés à la hâte, abandonnés à la va-vite comme si une menace planait et que le temps manquait pour emporter ses affaires. Cela aurait été presque glauque !
∼ Point de vue sur la ville déserte
Non loin de ces bâtiments, il y a un petit promontoire offrant un point de vue sur Humberstone et les alentours. De là, nous devons admettre que nos pensées se sont égarées…Nous avons imaginé le bruit des machines en marche pour extraire le salpêtre, les hommes s’affairant pour remplir les wagons sous une chaleur écrasante, les rues remplies de monde, la dureté du travail de mineurs, le bruit du train traversant la ville…Puis le bruit du vent frappant les tôles, nous a ramené à la réalité. Allez, il était temps de rejoindre Santa Laura avant que la nuit tombe. Avant de quitter Humberstone, nous avons fait une halte dans différents baraquements à l’entrée du site exposant divers objets de l’époque.
✴ Santa Laura, un vestige industriel
L’ancienne cité minière de Santa Laura est située à environ 1,5km d’Humberstone. Contrairement à cette dernière qui a conservé son aspect « ville » grâce à son secteur urbain, Santa Laura n’a pas eu cette chance. Tous ses quartiers résidentiels ont été démolis à l’exception de quelques bâtiments. Cette ville était plus petite que sa voisine avec environ 450 âmes contre 3700 à Humberstone. A ce jour, seuls des vestiges des bâtiments industriels utilisés pour le traitement du salpêtre sont visibles. Si vous ouvrez l’oeil, vous pourrez aussi voir l’ancienne ligne de chemin de fer reliant ces deux cités.
Informations pratiques pour visiter Humberstone au Chili
✴ Où se trouve la ville fantôme ?
Humberstone est située à environ 48 km d’Iquique dans la Pampa de Tamarugal qui se prolonge par le désert d’Atacama au Sud. Ce dernier est un des déserts les plus secs au monde, puisqu’il ne pleut quasiment jamais. Nous sommes donc dans la partie extrême Nord du Chili, caractérisée par ses paysages désertiques et ses différences de températures. Mais, si vous avez lu notre guide de voyage sur le Chili, vous devez déjà le savoir…
✴ Comment aller à Humberstone ?
Il y a différentes manières de rejoindre Humberstone :
- en tour organisé : certaines agences d’Iquique proposent des tours à la journée. L’inconvénient reste leur prix élevé (entre 20 et 30€/personne).
- en taxi : là encore, attention au porte monnaie car les prix peuvent vite s’envoler.
- en stop : c’est clairement la solution la plus économique d’autant plus que le stop au Chili marche très bien. C’est d’ailleurs celle que nous avons choisie entre San Pedro d’Atacama et Iquique.
- en bus : c’est une des solutions les moins chères. A la portion de la rue Barros Arana entre les intersections des rues Vicente Zegers et Almirante Latorre se trouvent plusieurs compagnies de bus les unes à côté des autres qui desservent Humberstone plusieurs fois par jour. Par exemple, la compagnie Santa Angela, qui dessert principalement la zone rurale entre Pica et Iquique, propose des trajets à Humberstone pour 1900 pesos (environ 2€/personne selon le taux de change). Sinon, vous pourrez trouver d’autres compagnies à destination finale de Pica ou Arica (comme Tur Bus), qui marquent un arrêt à Humberstone.
BON A SAVOIR︱Pour vous faciliter votre voyage au Chili, nous vous conseillons de réserver vos billets de transports via la meilleure plateforme de réservation en ligne : 12go.co. Hyper simple d’utilisation, les tickets sont réservés en un clin d’oeil. Idéal pour les voyageurs aimant planifier leur séjour ou pour anticiper les trajets.
✴ Combien coûte une visite à Humberstone ?
Humberstone et Santa Laura sont des sites gérés par la Corporación Museo del Salitre, une institution privée à but non lucratif, qui permet de protéger et de restaurer entres autres ces deux sites. Pour ces raisons auxquelles se rajoutent leur classement à l’UNECO, l’entrée est donc payante. Le prix d’entrée à la ville fantôme d’Humberstone et Santa Laura est fixé à 4000 pesos chiliens par adulte (environ 4€50 selon le taux de change).
A noter que ces lieux sont ouverts tous les jours (sauf le 1 janvier) de 9h à 18h ou 19h en fonction de la période de l’année. Quant à la durée de la visite, cela dépendra de votre attrait pour le lieu. Pour notre part, nous avons passé la journée à Humberstone.
BON A SAVOIR︱Humberstone est touristique sans l’être. Lors de notre visite, le « café » n’était pas ouvert. Heureusement, nos camel bags étaient remplis ! Un conseil : emportez de l’eau en quantité suffisante, les journées sont vraiment très chaudes ! Sans compter, les indispensables : crème solaire, chapeau et chaussures de marche (mais les tongs, c’est bien aussi tout dépend le confort que vous recherchez).
✴ Où dormir à proximité ?
Sachez qu’il n’est pas possible de camper sur le site, ce qui paraît logique. Par contre, nous avons pu planter notre tente en nous éloignant un peu. Gardez juste en tête que les nuits sont fraîches, voire froides. Haha, merci le Nord du Chili et ses écarts de températures extrêmes entre le jour et la nuit.
Si vous n’avez pas de matériel de camping, la solution la plus simple est de trouver un logement à Iquique. La ville d’Iquique est une station balnéaire au bord de l’océan pacifique où l’offre d’hébergements est vraiment variée. Si vous avez un petit budget, optez pour une auberge de jeunesse comme le Backpacker’s Hostel Iquique qui possède un joli rooftop vue océan, ou encore l’hostal Aloha Inn. Enfin, si vous voulez vous faire plaisir avec un hôtel en front de mer, le Gavina Costa Mar saura vous séduire avec sa piscine à débordement.
Alors, cette escapade vous tente ?
Et voilà, cet article touche à sa fin. A présent, vous avez toutes les infos nécessaires pour venir visiter Humberstone. Personnellement, nous avons vraiment adoré déambuler par-ci, par-là dans les rues de ces villes autrefois fourmillantes et à présent désertes. A chacun de nos pas, nous avons essayé d’imaginer des scènes de vie. C’était impressionnant de voir de manière authentique, ces anciennes usines de salpêtre uniques au monde. Nous avons eu l’occasion de remonter le temps pour découvrir la culture des Pampinos, la vie minière de l’époque et l’exploitation de ces gisements de salpêtre. Et puis, les lieux abandonnés ont vraiment quelque chose de fascinant ! Bref, Humberstone est à inscrire sur votre bucket list pour un voyage au Chili.
➳ Racontez-nous en commentaire, si vous avez déjà visité une ville fantôme. Si oui, où était-ce ? Ou alors, aimeriez-vous le faire ? Pour rester dans l’esprit minier, nous vous invitons à lire notre article sur la visite éprouvante des mines de Potosi en Bolivie ou d’une manière plus générale, nos aventures en Amérique du Sud.
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WOJCIECHOWSKI Philippe
5 novembre 2023C’était il y a 45 ans. La valorisation (mise en scène) touristique n’existait pas. Nous avons » jeté » un coup d’œil sur presque toutes les villes fantômes au bord de la route Panaméricaine … une seule avait encore un minimum d’activité. Il est difficile d’imaginer l’importance du salitre qui, dans les années 1940-50 était (à part le fumier) le seul engrais utilisé. J’ai connu, sans en comprendre leur signification, les grandes affiches peintes à la main sur beaucoup de maisons en France, qui vantaient les qualités du Salpêtre du Chili ! Cependant, il est à signaler que dans ces exploitations, la vie du simple ouvrier n’était pas » rose « , il existait même , des monnaies (ou même bons d’achats) spécifiques, non négociable ailleurs … ce qui » enchaînait » les ouvriers au désert. A part cela le complexe hôtelier, alors flambant neuf de la presqu’ île Cavancha d’ Iquique était excellent !
Les Loulous
17 novembre 202345 ans en arrière, Humberstone devait avoir encore plus l’aspect d’une ville fantôme. Même si elle est aujourd’hui « touristisée », si je peux dire, cela permet néanmoins de conserver ce patrimoine et de mieux comprendre, pour nous étranger, l’histoire du salpêtre. Mais également de nous rendre compte de la dure vie infligée aux ouvriers à l’époque.